Journée mondiale de lutte contre le sida

 La Journée mondiale de lutte contre le sida est un mouvement global qui, depuis 1988, unit les communautés dans le combat contre le VIH et le sida. Célébrée le 1er décembre chaque année, cette journée rappelle l’importance de la solidarité, de la sensibilisation et du soutien envers les personnes vivant avec le VIH.

En 2015, l’ONUSIDA a lancé des objectifs ambitieux pour éradiquer l’épidémie de VIH/SIDA d’ici 2030. Ces objectifs, connus sous le nom de 95-95-95, visent à ce que 95 % des personnes vivant avec le VIH connaissent leur statut, que 95 % de ces personnes aient accès à un traitement antirétroviral, et que 95 % des personnes sous traitement atteignent une suppression de la charge virale. 

À Maurice, selon les récentes statistiques plus de 9,000 personnes sont officiellement recensées comme ayant contracté le virus du Sida. 51% des personnes connaissent leur statut,  64% de ceux qui connaissent leur statut sont sous traitement et 45% de ces personnes ont atteint une suppression de la charge virale.  

La lutte contre la stigmatisation demeure essentielle pour atteindre les objectifs 95-95-95 et ainsi améliorer la qualité de vie des personnes séropositives et freiner la transmission du virus. 

La NSIF (National Social Inclusion Foundation) contribue activement à cette lutte en finançant plusieurs initiatives locales. Pour l’année financière 2024/2025, elle a alloué plus de Rs 23 millions pour soutenir les organisations qui œuvrent dans ce domaine, notamment dans la sensibilisation et l’accompagnement des personnes vivant avec le VIH.

C’est dans ce contexte qu’Andréa (nom fictif), une femme vivant avec le VIH depuis 18 ans, témoigne de son parcours marqué par la stigmatisation et le rejet social.

Femme responsable et fidèle, Andréa a vu sa vie basculer après un test sanguin effectué par son époux pour des raisons sans rapport avec le dépistage du VIH, révélant qu’il était séropositif. Ne perdant pas de temps, Andréa fait également un test et apprend qu’elle est elle aussi séropositive. Ce diagnostic marque le début d’une vie de tourments pour elle.

Plongée dans une profonde dépression, elle se sent trahie. Andréa était une épouse fidèle, mais c’est son mari qui avait introduit cette maladie dans leur vie de couple.

« J’ai fait plusieurs tentatives de suicide, toutes ratées », confie-t-elle.

Maman de deux enfants à l’époque, elle se retrouve seule face à un monde devenu hostile, son mari ayant quitté le foyer familial peu après sa dernière tentative.

Comme beaucoup d’autres, Andréa a dû faire face à un obstacle aussi pesant que la maladie elle-même : la stigmatisation. Ce rejet social, qui réduit considérablement les chances des personnes séropositives de mener une vie normale, est un combat quotidien.

Devenue mère célibataire et séropositive, Andréa doit également affronter une autre épreuve : la perte de son emploi.

« Une personne du centre de santé où je suivais mes traitements m’a reconnue alors que je travaillais. En mon absence, elle a divulgué mon état de santé à mon patron. Depuis ce jour-là, j’ai vu mes collègues prendre leurs distances. Mes affaires étaient mises de côté – j’étais isolée, et personne ne voulait s’asseoir à côté de moi pendant le déjeuner. »

Son employeur ayant appris son statut sérologique, elle est licenciée et se heurte ensuite à des portes fermées partout ailleurs. Dans son domaine, tout le monde se connaît, et la stigmatisation ne lui laisse aucune chance.

Pendant cette période, Andréa rencontre l’homme qui deviendra plus tard son compagnon. Bien qu’il insiste pour qu’ils se mettent ensemble, elle hésite, consciente que son état ne le lui permet pas. Finalement, un jour, elle décide de lui avouer son statut sérologique.

« Il avait les larmes aux yeux ce soir-là. Il m’a dit : “Je t’accepte comme tu es.” » raconte-t-elle.

Malgré leurs efforts pour se protéger, Andréa tombe enceinte à cause d’un préservatif défectueux quelques années après. Ses médecins la rassurent : elle pourra avoir un bébé en bonne santé. Effectivement, elle donne naissance à son troisième enfant, sain et sauf.

Aujourd’hui, Andréa se consacre à la lutte contre la stigmatisation des personnes séropositives. Elle déplore le manque de responsabilité de certaines femmes enceintes séropositives.

« J’ai vu des femmes ignorer les conseils et recommandations des médecins. Ça me fend le cœur de voir des bébés naître séropositifs alors que cela aurait pu être évité », confie-t-elle avec émotion.

Andréa avoue qu’elle aurait aimé briser les normes et parler ouvertement de son statut sérologique. Cependant, après avoir vu le regard des autres pendant toutes ces années, elle craint que ses enfants ne subissent des discriminations.

Elle se souvient de ses nombreuses visites à l’hôpital lorsque sa benjamine souffrait de problèmes respiratoires.

« J’ai vu des médecins mettre quatre paires de gants pour poser une perfusion à mon enfant, qui n’a pas ma maladie. Ce n’est que lorsque j’ai élevé la voix que le surintendant est intervenu pour remettre de l’ordre », raconte-t-elle.

Cette expérience l’a profondément marquée et l’a convaincue que, pour protéger ses enfants, elle ne révélerait jamais publiquement son état de santé.

De son expérience, Andréa a réalisé que ce n’est pas tant la maladie qui est destructrice, mais le regard des autres.

« Ce n’est pas la maladie qui tue, mais le regard et les préjugés des autres, qui empêchent souvent une personne séropositive de chercher des soins. Même le regard des soignants et des médecins est souvent empreint de préjugés et de discrimination », conclut-elle.

Aujourd’hui, Andréa se consacre à aider ceux qui se retrouvent dans une situation similaire à la sienne. Elle se dit fière de pouvoir être là pour épauler ceux qui se sentent seuls, tout comme d’autres l’avaient soutenue il y a 18 ans.

Elle reconnaît que les Mauriciens deviennent de moins en moins empreints de préjugés et espère sincèrement que cette tendance se poursuivra.